JUBILÉ 1855

Des le 29 Mars ,Monseigneur René François avait adressé au Souverain Pontife une supplique pour solliciter cette grace ;voici la traduction de la lettre de Sa Grandeur, écrite en latin

Très Saint-Père,

D’après les monuments les plus authentiques de l'histoire, il est constant qu'en l'année 1254 le 14 du mois d’avril, un miracle insigne eut lieu à Douai, l'une des principales villes du diocèse de Cambrai : Notre Seigneur Jésus-Christ le divin Rédempteur se montra visiblement dans une hostie consacrée, pendant plusieurs heures, à une multitude innombrable d'hommes.

Thomas de Cantimpré, homme d'une piété et d'une science rare, qui était alors suffragant de l’évêque de Cambrai vit et contempla de ses propres yeux ce fait si admirable ; il en écrivit la relation qu’il laissa la postérité.

La mémoire de cette apparition miraculeuse était chaque année renouvelée à Douai par une grande solennité .L’an 1754 l'anniversaire cinq fois séculaire fut célébré avec la plus grande pompe et cette ville témoigna dans cette circonstance une grande joie et une grande dévotion.

Héritiers et imitateur de la piété de leurs aïeux, les fidèles de Douai souhaitaient vivement, que l’année 1754 vient de s'écouler, de célébrer avec la même solennité et une semblable pompe le sixième anniversaire séculaire ; mais l'église paroissiale de Saint-Jacques, où la fête et les solennités devraient avoir lieu, était presque entièrement détruite. Or, cette année, les tra­vaux entrepris pour l’agrandissement et l'embellissement de cet édifice étant heureusement terminés j’ai cru opportun de donner mon assentiment aux voeux unanimes du clergé, du peuple et des magistrats

C’est pourquoi très  Saint-Père, je supplie avec instance Votre Sainteté de vouloir bien accorder une indulgence plénière à tous et à chacun des fidèles qui, vraiment contrits, s'étant confessés et ayant communiés, visiteront l'église Saint-Jacques en y priant aux intentions de Votre Sainteté du 14 au 22 du mois de juillet prochain, temps où la mémoire du Très Saint-Sacrement  de miracle sera célébrée  avec la plus grande démonstration religieuse.

J’ai la confiance certaine, Très Saint-Père, qu'il en résultera un grand bien, non seulement pour la ville de Douai, mais encore pour tout le reste de mon diocèse, et que cela servira à exciter au plus haut point dans un grand nombre d'âmes, des sentiments de foi, de respect et de piété, envers le Très Saint-Sacrement de l'Eucharistie.

Prosterné aux pieds de Votre Sainteté, je demande pour moi, pour mon clergé et pour tout le troupeau confié à mes soins, votre bénédiction apostolique.

 

De votre Sainteté, Très Saint-Père

Le très humble et très respectueux serviteur et fils

RENÉ-FRANCOIS, archevêque de Cambrai.

 

19 mars 1855

 

Cette lettre s’égara soit dans les bureaux de la poste, soit dans les bureaux de l'agence diocésaine a Rome. Comme l'on ne recevait à Cambrai aucune expédition, on s'informa de la supplique près de l'agent « il signor Ferucci » qui répondit qu'elle lui était inconnue.

Il fallut vers la fin  juin, la formuler de nouveau avec prière de la placer sans aucun retard   sous les yeux du Saint-Père et de faite connaître, par voie télégraphique, la décision de sa Sainteté a cet égard. Ce fut seulement trois jours avant l'ouverture des fêtes que, par  la vie indiquée arriva la nouvelle de l'expédition du Bref, et ce Bref à son tour ne fut arrivé dans les mains du Prélat que le 18 juillet. Voici cette pièce avec sa traduction

 

PIE IX, PAPE,

 

« A vous les fidèles chrétiens qui les présentes, liront, salut et bénédiction apostolique.

Pressé par une pieuse  charité d'augmenter, à l'aide des trésors de l'Église, la dévotion des fidèles et de procurer le salut des âmes, Nous accordons avec miséricorde et au nom du Seigneur, à tous les fidèles

de l`autre sexe qui, vraiment contrits, s'étant confessés et ayant communié , visiteront du quatorze au vingt deux juillet de la présente année l’église Saint-Jacques à Douai, diocèse de Cambrai, et y adresseront à Dieu de ferventes prières pour le maintien de la concorde entre les princes chrétiens, l’extirpattion des hérésies et l’exaltation de notre Mère la Sainte Eglise catholique, uune indulgence plénière et la rémission entière d eleurs péchés ; laquelle indulgence pourra être gagnée par chaque fidèle une fois , dans un de ces jours à son choix. Les présentes n’ont de valeur que pour cette fois seulement. Donné à Rome, à Saint-Pierre, sous l’anneau du Pêcheur, le troisième jour de juillet, l’an 1855, la dixième année de notre Pontificat.

                              Pour Monseigneur le Cardinal Macchi,

                              J.B. Brancaleoni Castellani, substitut.

« 

Chose  remarquable ! Ce Bref est conçu dans les mêmes termes que celui accordé par Benoit XIV pour la célébration du Jubilé en 1754.

Le Jubilé n’était point la seule faveur que Monseigneur l’Archevêque de Cambrai accordât à l’Eglise Saint-Jacques. Pour rendre ce temple nouveau plus vénérable et plus digne des pompes qui allaient se déployer sous ses voutes, il voulut lui conférer un caractère qui manque bien souvent aux temples même les plus beaux : la consécration solennelle. Cette cérémonie eut lieu le 14, à sept heures du matin, et fut présidée par Monseigneur Dufêtre, Evêque de Nevers.

 

L’annonce officielle du jubilé fut donné le dimanche de Quasimodo (dimanche de la Divine Miséricorde). Il devait durer du 14 au 22 juillet et se terminer par une grande procession à Douai, ainsi qu’à Cambrai et Lille. Mgr Reignier , Archevêque, souligna  que « la Fête séculaire du Très Saint-sacrement de Miracle, c’est la Fête de la Cité toute entière.  Elle aura le caractère de splendeur que la cité voudra lui donner». Mr le Maire dont le zèle pour ce qui eut rapport au Jubilé est au-dessus de  tout éloge, ordonna le badigeonnage extérieur de toutes les maisons. Bientôt il ne reste plus de famille où l’on ne s’entretienne de cette fête. En peu de temps l’enthousiasme pénètre dans les âmes et les échauffe  de son plus beau feu. La ville de Douai toujours calme et paisible sort difficilement de son caractère. Cependant le Douaisien est susceptible d’être exalté toutes les fois que de nobles sentiments font entendre leurs voix à son âme.

Comme l’avait fait l’échevinage, le Conseil Municipal tint à l’honneur de s’associer à la Fête du Saint-Sacrement de Miracle et de déclarer par un vote qu’elle était la Fête de la cité.

Le Saint-Père PIE IX, à la demande de l’Evêque de Cambrai,  accorda une indulgence plénière aux participants.

Le cortège est honoré par les trois madones,  

la Sainte vierge est ainsi représentée par les images miraculeuses de Notre Dame de la Treille de Lille, et de Notre Dame de Grace de Cambrai spécialement amenées en procession, et de Notre Dame des Miracles de Douai. 

La procession du Saint des saints est présidée par Mgr Samihiri, patriarche d’Antioche, auréolé du martyr par la suite, et par les évêques de Saint-Flour, Angoulême, Soissons, Nevers, Gand, Arras et Cambrai. Les bannières reprennent 19 siècles de foi :

« Celui qui mange ce pain indignement, mange sa condamnation, St-Paul – Ier s

Ce pain est le corps du Seigneur, St Irénée - II s

Notre chair se nourrit du corps de Jésus-Christ, Tertullien - III s

Le corps de Jésus-Christ est donné sous les apparences du pain, St Cyrille - IV s

Jésus-Christ nous donne son corps en nourriture, Saint Chrysostome - V s

Ce qui paraît du pain est le corps de Jésus-Christ, Saint Rémi - VI s

Jésus-Christ change le pain en son corps, Saint Grégoire - VII s

Ce n’est point une figure, mais vraiment le corps de Jésus-Christ, St Jean Damascène - VIII s

Il faut croire que le pain est changé en la chair de Jésus-Christ, Paschase Radbert - IX s

La matière du pain est changée en la substance de Jésus-Christ, Fulbert- X s

Ce qui parait du pain est vraiment la substance de Jésus-Christ, St Anselme - XI s

L’hostie n’est plus du pain, mais la chair qui fut crucifiée, St Bernard-XII s

La chair de Jésus-Christ est une nourriture, St Thomas d’Aquin- XIII s

Institution de la Fête Dieu au concile de Vienne, - XIV s

O créateur, vous nous donnez à manger votre très Saint Corps, Thomas  Kempis - XV s

La substance du pain est changée en la substance du corps de Jésus-Christ, Concile de Trente - XVI s

Nous mangeons réellement le corps de Jésus-Christ, Bossuet – XVII s

Le péché le plus énorme est la communion indigne, Brydaine -  XVIII s

Dans le tabernacle, son amour le tient enchainé, Cardinal Giraud- XIX s »

 

Oriflamme du jubilé

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