Pièces officielles du procès d'enquête de 1854
Communiquées par M, le Chanoine DUBRULLE, Bibliothécaire des Facultés Catholiques de Lille.
Les Pièces Officielles du Procès d'Enquête Prescrites en 1854
par Son Éminence le Cardinal Régnier
La suspense de l'enquête prescrite par le Cardinal Régnier, ainsi que les conclusions provisoires du dit procès d'enquête, sont bien le fruit des circonstances qui ont encadré toute l'affaire en 1854.
En effet, de ces circonstances mêmes nous avons logiquement déduit et montré la mentalité qui a motivé la décision du Cardinal de surseoir « soi-disant jusqu'à plus ample informé », mais en réalité pro bono Pacis et laps de temps canonique requis (100 et non 30 ans comme en droit civil), pour établir la prescription en faveur de la propriété de reliques ou objets religieux quelconques.
Et les ordonnances diverses prises également par le Cardinal, comme par exemple la défense de rien publier faite aux Douaisiens aussitôt la connaissance à l'Archevêché de la découverte de la Sainte Hostie miraculeuse à Saint-Pierre, comme d'autre part la détermination arrêtée par le Cardinal qu'il n'y aurait plus - du moins sous son épiscopat - de jubilé séculaire ni procession extraordinaire à ce sujet, dénotent suffisamment les preuves qui nous ont permis de déduire l'état d'esprit du Cardinal sur les difficultés du milieu.
Par ailleurs sa conviction intime et personnelle sur l'identité de l'Hostie retrouvée à Saint-Pierre et de la Sainte Hostie Miraculeuse de Saint-Amé nous est garantie par les ordres précis qu'il donna à cet effet.
1° De conserver l'Hostie dans le Tabernacle alors qu'il en avait banni tout le reste quelque relique que ce soit !
2° De continuer les recherches pour arriver à plus ample informé.
En sorte que nous avons pu formellement affamer qu'il ne s'agit en rien d'une fin de non recevoir mais bien d'une suspension toute provisoire motivée pro bono Pacis et prescription canonique pour légitime propriété d'objets religieux.
Cette conclusion que nous venons d'exposer dans le chapitre précédent n'est point du tout, ajoutions-nous, le fait d'impression subjective ou de partialité quelconque par sympathie à l'endroit de l'Hostie de Saint-Pierre, mais purement et simplement la déduction logique et toute objective des faits tels que nous les avons exposés, et rappelés ici brièvement :
D'où, après plusieurs années de recherches et de réflexion, nous avions donc abouti à cette certitude étayée, nous venons de le voir, de solides garanties, et déjà toute la charpente de notre article précédent, non seulement était établie, mais la rédaction même en était achevée.
Quand, grâce à l'intervention de M. le Chanoine Dubrulle, bibliothécaire de l'Université Catholique de Lille, une brusque, et péremptoire confirmation de toute notre conclusion est fournie par la découverte inespérée des pièces officielles du procès d'enquête de 1854.
En effet, après plusieurs recherches à l'Archevêché de Cambrai où, nous avons obtenu de Son Excellence Mgr Chollet la permission de compulser les archives et la grande bibliothèque, ainsi que la réserve au premier étage (Bref, ordonnances, mandements de Carême des Archevêques de Cambrai), nous étions dans l'obligation de constater, hélas ! que tout a été brûlé par les bombardements allemands en 1914-1918 et que nous ne pouvions y découvrir les pièces officielles du procès de l'enquête prescrite en 1854 par le Cardinal Régnier.
C'est alors que, poursuivant nos recherches sur le Curriculum Vitae des deux bénéficiers de Saint-Amé, parents d'Alexandre Mornave : les chanoines Dubrulle, après les détails fournis déjà à leur sujet par M. le Chanoine Chartier, nous avons sollicité du Bibliothécaire de l'Université Catholique l'accès de la grande bibliothèque de cet établissement.
Et, tout en causant du Saint-Sacrement de Miracle, quelle ne fut pas notre stupéfaction d'entendre le vénéré Chanoine, M. Dubrulle, nous dire relativement aux conclusions de notre chapitre précédent :
Vous êtes dans le vrai et vous avez très exactement exprimé la réalité objective de toute l'affaire .
Heureux, mais assez surpris d'une confirmation aussi catégorique, nous avons demandé alors à notre docte interlocuteur ce qui lui permettait de nous confirmer ainsi avec une telle assurance.
C'est que, ajouta, M. Dubrulle, j'ai en mains des pièces officielles du procès et de l'enquête » de 1854 prescrite à ce sujet par le Cardinal Régnier ».
C'était plus que jamais le cas de bondir sur l'occasion et de demander sur-le-champ à M. Dubrulle la permission de dactylographier ces importantes pièces - ce qui fut accordé - et en voici toutes les copies certifiées exactes et authentiques par la signature même du Bibliothécaire précité apposée au bas de chacune d'elles.
Nous les soumettons au jugement du lecteur sans aucun commentaire, lui laissant le soin d'apprécier avec quelle objectivité, impartialité et exactitude nous avons traité le sujet.
Toutefois avant de clore ce chapitre nous tenons à redire au distingué et érudit bibliothécaire de l'Université Catholique, avec toute la gloire qu'il procure ainsi à la Sainte Hostie miraculeuse du Très Saint-Sacrement de Miracle de Douai, tous les remerciements de Son Excellence Mgr Chollet, archevêque de Cambrai, et de la province ecclésiastique susdite ainsi que la respectueuse reconnaissance de l'auteur de ces lignes, jointe au sympathique merci de Douai et des lecteurs du présent ouvrage.
PREMIÈRE LETTRE
(copiée sur l'original) H. D.
DU R. P. POSSOZ,
DOUAISIEN, DE LA COMPAGNIE DE JÉSUS,
A MONSEIGNEUR RÉGNIER, ARCHEVÊQUE DE CAMBRAI.
Monseigneur,
M. l'Abbé Capelle m'a demandé, selon le désir que lui avait exprimé Votre Grandeur, les renseignements que je pouvais lui donner sur l'Hostie miraculeuse. Je lui ai envoyé immédiatement la substance de deux lettres que j'avais écrites à M. le Curé de Saint-Pierre, dans le courant de novembre. Je ne pouvais pas alors lui envoyer autre chose, je n'avais plus rien, je ne savais plus rien.
En m'accusant réception de cet envoi, l'abbé Capelle m'a paru donner une importance peut-être excessive au jugement des archéologues dont il voulait, disait-il, faire la base de ses preuves.
Je lui ai fait observer que cette Hostie ne serait pas nécessairement l'hostie sauvée par M. de Ranst, parce qu'elle aurait le cachet du XIIIe siècle ; que même ce cachet, en le supposant évident, ne prouverait pas davantage que cette Hostie date bien du XIIIe siècle, puisqu'elle pourrait tout simplement avoir été moulée à une époque postérieure avec un vieux fer exhumé ; que sans doute si on découvrait dans cette Hostie un cachet certain d'un siècle postérieur au XIIIe, il faudrait nécessairement en conclure qu'elle n'est pas l'Hostie sauvée par M. de Ranst, mais qu'une décision favorable des iconographes ne nous donnerait, ce me semble, au plus, de son identité, qu'un confirment de médiocre valeur.
L'Abbé Capelle tenait beaucoup aussi, après avoir prouvé que cette hostie est certainement l'Hostie vénérée à Saint-Amé, il y a 70 ans, à démontrer qu'elle était bien l'Hostie miraculeuse.
Je l'ai averti que cette discussion, dans son rapport, serait inutile et inconvenante ; qu'elle serait inutile, parce qu'on n'en doutait pas il y a 70 ans, on n'en a jamais douté dans les siècles antérieurs ; cela est prouvé par tout ce qui s'est toujours fait dans la vue d'honorer cette Hostie, et par les témoignages des écrivains de toutes les époques. Quelles raisons aurions-nous d'élever aujourd'hui un doute à cet égard ? Si la révolution, lui disais, je n'avait pas eu lieu, et que la sainte Hostie ne fût pas sortie, en 93, de son tabernacle, y aurait-il urgence, nécessité, une raison quelconque d'examiner cette question ? Pourquoi y aurait-il urgence, nécessité de la soulever aujourd'hui, lorsque cette Hostie ayant été retrouvée, il est une fois solidement établi que c'est bien elle ?
Je lui disais que cette question serait inconvenante : inconvenante surtout devant une commission composée en partie de laïques. Elle ferait nécessairement supposer qu'on a de sérieux motifs de les rassurer, et sur la probité des anciens chanoines qui n'a jamais été contestée, et sur la vigilance et le zèle de nos évêques qui, pendant six siècles, ont toujours autorisé, sans réclamation aucune, le culte rendu à cette Hostie. Votre Grandeur, du reste, a écrit au curé de Saint-Pierre, m'a-t-on dit, que cette question devait être rejetée d'une manière absolue. En effet, nemo proesumitur malus ; la justice et la charité exigent que l'on croie à la probité d'une corporation ou d'un individu, à moins qu'il ne survienne quelque motif légitime de présumer le contraire. Pourquoi mettrions-nous en dehors du droit commun des prêtres, des chanoines qui ont presque toujours compté parmi eux les plus doctes et les plus pieux professeurs de nos séminaires et de cette ancienne Université qui, au XVI ème siècle, a été, contre l'hérésie, comme un boulevard inexpugnable et à laquelle, après Dieu, nous sommes redevables de la pureté de notre foi. Je ne sais quelle impression toutes ces raisons ont produite sur M. Capelle : depuis lors, contre mon espérance, il ne m'a plus donné de ses nouvelles.
Après quelques hésitations, Monseigneur, je me suis décidé à rédiger aussi de mon côté un rapport sur la découverte de cette Hostie et sur son identité. J'ai l'honneur de l'adresser à Votre Grandeur.
Ut minus sapions dito : je me mêle peut-être de ce qui ne me regarde guère. Mais je compte sur l'indulgence de Votre Grandeur qui me pardonnera facilement un excès de zèle, et l'intérêt probablement trop vif que j'apporte à cette affaire.
Ce qui me détermine encore à surmonter mes répugnances, c'est que si ce rapport n'ajoute rien au travail que prépare M. Capelle au moins il n'en diminuera pas le mérite. J'ajouterai que Votre Grandeur elle-même, toujours si prudente et si sage, m'a encouragé à cette démarche : car en désirant que l'abbé Capelle se mît en communication avec moi, Elle a évidemment jugé que, dans cette affaire, la surabondance ne pouvait jamais nuire. Je dirai enfin, pour compléter ma justification, que j'ai causé avec l'excellent P. Dérice, mon ami de cœur, qui vous conserve, Monseigneur, le sentiment bien profond d'une respectueuse affection ; il m'a assuré que l'envoi de ce rapport vous serait certainement agréable.
Si j'ai encore besoin de pardon, Monseigneur, je supplie Votre Grandeur de ne pas me le refuser, et de vouloir bien y joindre sa bénédiction. Je la recevrai avec une reconnaissance toute filiale, et j'ai confiance qu'elle ne contribuera point peu au succès du jubilé que je commence, ce soir, dans cette pauvre ville tic Châteaubriant.
J'ai l'honneur d'être, Monseigneur, avec la plus profonde vénération et le plus parfait dévouement,
De Votre Grandeur,
Le très humble et obéissant serviteur, A. Possoz.
Lettre ayant été en ma possession et disparue en mai 1940.
DUBRULLE Henry.
DEUXIEME RAPPORT (dactylographié sur l'original) H. D.
du R. P. Possoz
A MONSEIGNEUR L'ARCHEVÊQUE Monseigneur,
Dans une des premières semaines d'octobre 1854, M. Héroguer, curé de Saint-Pierre de Douai, découvrit dans son église, sous le Christ de l'autel des Trépassés, un coffret en bois hermétiquement fermé et solidement cloué.
Le 19 du même mois, passant à Douai, j'eus l'honneur de le voir, et nous visitâmes ensemble, dans le plus menu détail, le contenu de ce petit coffret.
Nous y trouvâmes
1° Un billet écrit de la main d'un nommé Mornave, dont voici la substance : « je soussigné Alexandre Mornave déclare donner à la paroisse Saint-Pierre, pour être l'ornement de l'autel des Trépassés, ce petit coffre, et les reliques qu'il contient. Elles proviennent de Saint- Pierre, de Saint-Amé et de différentes églises de Douai : elles ont été sauvées à la révolution ».
Des renseignements ont été pris sur les Mornave. Ils ont tous joui de la plus excellente réputation : ce témoignage leur a été rendu par des personnes sûres et de toute condition.
Nous nous souvenons nous-mêmes que notre pieuse mère, lorsqu'elle avait à se fournir de quelqu'objet concernant l'état des Mornave, tenait à ce que l'on s'adressât à eux de préférence, à cause de leur religion et de leur probité bien reconnue. L'un d'eux, Jérôme Désiré Joseph, décédé vers 1810, menuisier habile, travaillait au moment de la révolution pour les églises Saint-Pierre et Saint-Amé. Son épouse, femme très pieuse, avait deux de ses frères attachés à la Collégiale de Saint-Amé en qualité de bénéficiers. Il paraît que pendant les jours de terreur, la maison de Jérôme servait d'asile aux prêtres fidèles et qu'on y administrait les Sacrements. Jérôme avait un cousin maître menuisier comme lui, et qui s'associait quelquefois à ses travaux, Pierre-Joseph Mornave, qui jouissait ainsi que Jérôme d'une grande réputation de religion et de probité. Alexandre Mornave, qui a signé notre billet, est né en 1774, de Pierre Joseph. Il était estropié ; et dès l'âge le plus tendre il montrait un goût remarquable pour toutes les choses de piété. L'excellent M. Desmarets, maître couvreur, et l'un des plus fervents paroissiens de Saint-Pierre raconte qu'étant jeune il allait souvent jouer avec Alexandre, et que l'amusement favori du jeune Mornave était de dresser des chapelles. La piété d'Alexandre ne s'est jamais démentie ; après la mort de son père il alla demeurer à Cambrai, mais on ne sait où il a terminé ses jours.
2° Nous avons aussi trouvé dans ce petit coffre, quelques ossements de saints, une partie du cilice de Thomas Morus, puis enfin une boîte ronde, en fer blanc, à double fond, contenant une petite Hostie qui porte pour empreinte l'image de Jésus-Christ crucifié. Elle était encore blanche la première fois que je la vis, et un peu endommagée sur les côtés : nous ouvrîmes un papier placé entre les deux couvertures de la boîte : c'est un billet ainsi conçu :
« Ego infra scriptus, canonicus insignis ecclesiae collegiatae Sancti Amati, atteste hanc valide venerandam de sancto miraculo hostiam, jam imminenti profanations periculo subtractam et fauste compertam, in hac pixide deposuisse, et hoc testimonium, fidelibus post hac reperturis, propria manu scriptum reliqui ».
Hac die vigil. Epipha. 1793
DE RANST.
M. de Ranst a été le dernier prévôt de la Collégiale de Saint-Amé, il appartenait à l'une des plus nobles familles du pays. Ce digne confesseur de la foi est mort en émigration.
En ma qualité de Douaisien, Monseigneur, je viens supplier Votre Grandeur, de vouloir bien rendre au culte de mes pieux concitoyens, cette Hostie qui était vénérée dans l'ancienne Collégiale de Saint-Amé, depuis 1254, année où s'opéra dans cette église le miracle dont la ville de Douai se prépare à célébrer la fête séculaire.
Je vais développer ici la preuve qui nous semble établir l'authenticité de cette Hostie. Elle paraîtra assez solide à Votre Grandeur (c'est du moins notre espérance) pour la déterminer à nous donner une décision favorable.
Nous n'avons pu confronter le billet signé De Ranst, avec une autre pièce écrite par ce vénérable prêtre. Mais cette confrontation n'est pas indispensable, et dans la supposition où M. Capelle ne serait pas plus heureux que nous dans ses perquisitions, on ne pourrait élever un doute raisonnable sur l'authenticité de notre billet. Un juge fort sévère et très judicieux, un homme aussi recommandable par sa piété sincère que par l'étendue de ses connaissances, M. Le Glay, qui est accoutumé à prononcer sur la valeur de pareilles pièces, déclare dans une lettre qui a été remise à Votre Grandeur « que disputer sur l'authenticité de cet écrit, ce serait être plus chicanier qu'il n'est permis de l'être n.
Or dans cet écrit, M. De Ranst affirme avoir soustrait au danger imminent de la profanation, l'Hostie Miraculeuse de Saint-Amé.
Que la Sainte Hostie ait été en effet soustraite, c'est ce qui ressort des récits que j'ai souvent entendus de la bouche des anciens. Ils m'ont raconté plusieurs fois, que Fénasse, orfèvre démagogue, au moment où il s'empara de la boîte vénérée pour la profaner, n'y trouva qu'un morceau de batiste (sans doute un corporal), et qu'il s'écria en le secouant : Voilà donc tout ce qui était l'objet de la superstition des femmes. Je puis affirmer sous la foi même du serment, si cela était jugé nécessaire, l'exactitude de ce que j'avance. J'ai même quelques raisons de penser que les personnes de qui je tiens ce récit, ont été témoins oculaires du sacrilège de Fénasse. Une pieuse demoiselle, qui vit maintenant retirée à Douai, chez les religieuses de Sainte-Marie, Mlle Rose Dubreuque, affirme aussi avoir entendu dire au vénérable M. Levesque, ancien chanoine de Saint-Amé, et qui a été pendant de longues années curé de notre paroisse Saint-Jacques, que l'Hostie avait été sauvée par un de ses confrères ; qu'elle était conservée quelque part, qu'il ne savait où, mais qu'il espérait que Dieu permettrait qu'on la découvrît un jour.
D'un autre côté, il est impossible de soupçonner de mensonge la déclaration de M. de Ranst. Le courage avec lequel il a confessé la foi dans les mauvais jours, le met à l'abri d'une supposition aussi injurieuse. Puis, dans quel but, M. de Ranst aurait-il fait ce mensonge ? Dans quel intérêt aurait-il consigné cette imposture dans un billet écrit de sa main, qui, s'il eût été trouvé par les révolutionnaires (et il n'était pas impossible qu'il le fût) l'aurait exposé aux plus grands dangers ?
Il est donc hors de doute que l'Hostie Miraculeuse de Saint-Amé a été sauvée par M. de Ranst, et si l'Hostie trouvée à Saint-Pierre, dans la boîte en fer blanc, avec l'écrit de M. de Ranst, est la même que celle qu'il y a déposée, il est également certain que cette Hostie est l'Hostie Miraculeuse.
Mais que cette Hostie soit l'Hostie déposée par M. De Ranst, il ne nous semble pas possible, d'en douter. Car la substitution n'aurait pu être faite que de 93 à 1805, puisque depuis 1805 jusqu'au mois d'octobre dernier, le petit coffre contenant la boîte, l'Hostie et le billet de M. Ranst n'a pas cessé de reposer hermétiquement fermé et solidement cloué, sous le Christ de l'autel des Trépassés. Mais cette substitution par qui aurait-elle pu être faite ?
Par les Mornave ?
Mais les Mornave étaient des hommes craignant Dieu : ils étaient incapables d'une pareille fraude.
Il faut aussi remarquer que les Mornave, avant de faire cette substitution, auraient dû d'abord détruire l'Hostie déposée par M. de Ranst. Cet acte n'aurait-il pas répugné à leurs sentiments chrétiens qui nous sont connus ?
Dira-t-on que malgré leur répugnance, les Mornave ont pu céder à la crainte d'être compromis par la présence d'un dépôt de cette nature.
Mais alors n'auraient-ils pas détruit aussi le billet de M. de Ranst, dont la présence, en cas de visite domiciliaire, était bien plus propre à les compromettre que la présence de l'Hostie ?
Il est donc tout à fait invraisemblable que les Mornave aient détruit la Sainte Hostie. Cependant, malgré son invraisemblance, admettons cette supposition.
Pourquoi Alexandre Mornave, en 1805 en aurait-il substitué une autre ?
On ne pourrait lui soupçonner d'autre intention que celle de se faire valoir, évidemment. Mais dans le billet écrit de sa main, Alexandre Mornave ne parle pas de la Sainte Hostie il n'en fait pas une mention plus particulière que des autres reliques. Il donne, dit-il, à la paroisse Saint-Pierre, le petit coffre et toutes les autres reliques qu'il contient, et il ne spécifie nullement que parmi ces reliques se trouve l'Hostie Miraculeuse de Saint-Amé. Certainement ce n'est pas ainsi qu'Alexandre Mornave aurait agi, si, dans l'intention de se faire valoir, il avait remplacé par une autre Hostie, l'Hostie miraculeuse précédemment détruite par lui ou par son père. Il paraît à peu près certain que les Mornave ont ignoré qu'ils possédaient la Sainte Hostie. Donc substitution n'a pas pu être faite ; il est même impossible qu'ils en aient eu la tentation.
Les Mornave ont-ils reçu immédiatement de M. de Ranst le précieux dépôt ? Nous ne pouvons pas l'affirmer d'une manière positive : mais cela nous paraît fort probable.
La famille Mornave était probe, honnête et chrétienne : un de ses membres travaillait pour Saint-Pierre et Saint-Amé. Son épouse, femme très pieuse, avait deux de ses frères attachés à la Collégiale de Saint-Amé, en qualité de bénéficiers. Les Mornave étaient connus, appréciés de M. de Ranst. Leur position les rendait plus propres que des personnes d'un rang plus élevé, à conserver, avec moins de périls, de semblables dépôts. Observons, en outre, que le petit coffre remis par Alexandre Mornave contient des reliques provenant de différentes églises de Douai ; d'où nous pouvons au moins présumer que les prêtres qui étaient parvenus à soustraire quelques pieux objets à la profanation, confiaient volontiers aux Mornave leurs précieux débris.
Au reste, admettons, si l'on veut, que la Sainte Hostie, avant d'arriver aux Mornave, a passé par d'autres mains que celles de M. de Ranst ; il est au moins hors de doute que si M. de Ranst n'a pas remis directement aux Mornave cette Hostie, il ne l'a confiée dans tous les cas, qu'à des personnes sûres, dont il connaissait la religion et la probité, et par conséquent à des personnes aussi incapables que les Mornave, d'une fraude sacrilège.
Puis, revient encore ici cette question ; dans quel but, dans quel intérêt, ces personnes auraient-elles détruit l'Hostie déposée par M. de Ranst pour en substituer une autre ? Cette supposition est invraisemblable et, par suite, elle ne peut en rien affaiblir la certitude morale que nous avons de l'authenticité de notre Hostie. Car dans les appréciations morales, ce qui est invraisemblable, est moralement impossible.
Mais la certitude morale n'est-elle pas la seule qu'on puisse exiger, la seule possible dans ces sortes de questions ?
J'entends la messe d'un prêtre que je ne connais nullement ; supposons même que la manière dont il célèbre ne me donne qu'une idée fort médiocre de la vivacité de sa foi. Au moment de la Consécration, je me prosterne et j'adore. Pourtant ce prêtre a-t-il bien eu l'intention de consacrer ? Il me paraît bien recueilli : à l'instant solennel, n'a-t-il pas eu quelque distraction qui, peut-être à son insu, lui a fait omettre ou altérer les paroles sacramentelles? Toutes ses suppositions ne sont pas vraisemblables ; et c'est uniquement parce qu'elles ne sont pas vraisemblables que nous adorons sans hésiter.
Pour admettre sensément une supposition, il ne suffit donc pas qu'elle ne soit point métaphysiquement impossible ; il faut de plus qu'elle soit au moins vraisemblable.
Quelques personnes nous ont adressé ces questions qui sont bien naturelles : Pourquoi M. de Ranst n'a-t-il pas soustrait, avec la Sainte Hostie, la boîte en vermeil qui la renfermait ? Pourquoi M. de Ranst n'a-t-il confié son secret à personne ? Comment les Mornave paraissent-ils avoir ignoré que la Sainte Hostie se trouvait parmi les pieux objets confiés à leur religion ?
Remarquons, tout d'abord, que l'impossibilité de donner une raison satisfaisante à ces questions et à toutes les autres de même nature, ne pourrait ébranler un fait d'ailleurs solidement établi. Nous pouvons en juger par d'autres faits, qui, même au seul point de vue humain, jouissent de la plus grande certitude morale possible.
Pourquoi Ève n'a-t-elle pas été saisie de frayeur en entendant parler un serpent ? Comment a-t-elle bien osé lier conversation avec lui ? De quelle manière Noé s'y est-il pris pour loger dans l'Arche tous les animaux que le Seigneur voulait sauver du déluge ? Comment Pharaon, en voyant le miracle des eaux de la Mer Rouge, s'est-il décidé à s'engager dans leur lit avec son armée ? Sans doute les commentateurs et les apologistes de la religion ont cherché à répondre à toutes ces questions ; mais leurs réponses ne sont que des conjectures, et pourtant les faits, à l'occasion desquels on élève toutes ces questions, n'en sont pas moins certains. Ils le seraient, indépendamment des réponses données par les commentateurs et les apologistes, parce que les objections qu'on peut tirer de ces difficultés n'atteignent pas la substance des preuves de certitude morale sur lesquels ces faits reposent.
Après ces observations nous répondons :
1° M. de Ranst a agi prudemment. Il ne pouvait enlever la boîte contenant la Sainte Hostie, et dont chacun connaissait l'existence, sans provoquer des perquisitions dangereuses qui n'auraient pas été sans résultat. Il était plus sûr et plus sage d'enlever ce qui était surtout précieux aux yeux de la foi, et de laisser le reste.
2° Qui sait si M. de Ranst n'a pas confié son secret à quelque personne, morte depuis, mette même avant que la paix ait été rendue à l'Église ? Au reste, dans ces temps de trouble, on ne devait pas être fort prodigue de confidences semblables.
3° On a remis sans doute aux Mornave la Sainte Hostie avec d'autres reliques, sans entrer dans le détail ; on se sera contenté de leur dire : voilà de pieux objets que nous confions à votre garde. Ne peut-on pas supposer que ce dépôt a été remis aux Mornave dans des circonstances telles que l'on n'a pas eu le temps de leur donner une explication ? Le profond respect que les pieux chrétiens portent généralement aux choses saintes, explique suffisamment la discrétion des Mornave, qui n'ont pas examiné ce que l'on avait déposé entre leurs mains.
Après cette exposition, Monseigneur, Votre Grandeur tirera peut-être la même conclusion que nous. Il est certain, et certain d'une certitude morale du plus haut degré, que nous avons retrouvé l'Hostie miraculeuse de Saint-Amé.
Si cette preuve a réellement la valeur que nous lui croyons, elle paraîtra sans doute suffisante à Votre Grandeur ; mais quelques personnes ayant pensé que peut-être nous pourrions y joindre une autre preuve tirée du caractère particulier des hosties du moyen âge, nous avons consulté quelques ouvrages, où nous espérions trouver les renseignements désirables : Gavantus, D. Martène dans son excellent ouvrage De ritibus antiquis Ecclesiae, les conférences d'Angers sur l'Eucharistie, Jean Devoti dans ses Institutions canoniques, Benoît XIV dans son beau traité De sacrificio Missae, le volume De Liturgicis du cours complet de Migue.
Gavantus ne nous a rien appris : D. Martène s'étend beaucoup sur les hosties du rit grec dont nous n'avons que faire et ne dit presque rien des autres ; mais les Conférences d'Angers, le volume De Liturgicis, Jean Devoti, Benoît XIV nous donnent une description assez ample des hosties du moyen âge.
Leur forme était ronde, leur dimension de la grandeur d'un denier, leurs empreintes représentaient l'image d'une croix, ou bien celle de Jésus-Christ crucifié, ou bien toute autre image qui avait rapport au Sauveur. Dans le volume De Liturgicis, nous lisons que les hosties du moyen âge étaient minces et moins légères que de nos jours.
Notre Hostie possède tous ces caractères ; mais si nous nous en tenons à ces caractères généraux, nous pensons qu'il serait facile d'en trouver de plus modernes qui les possèdent au même degré.
Notre Hostie porte pour empreinte l'image de Jésus crucifié, et nous savions déjà par le crucifix des vitraux de Bourges, de Saint-Denis, de Strasbourg, et par un Christ que possède la paroisse de Wattignies (près Seclin) lequel provient de Blanche de Castille, mère de saint Louis, que les Christs du moyen âge se distinguent à la manière dont les bras sont étendus et à la ceinture qui entoure les hanches du Sauveur.
Pour avoir des détails plus précis et plus complets, nous avons consulté les mémoires archéologiques publiés par les PP. Charles Cahier et Arthur Martin, tous deux fort estimés dans le monde savant par leurs connaissances iconographiques ; or, nous lisons dans un de ces mémoires intitulé Crucifix de Lothaire, et signé par le P. Cahier :
1° « Le crucifix des hautes époques, suppose au Sauveur une taille élevée, (vol. I, p. 230-23t) ».
2° « Plus on s'élève dans les siècles du moyen âge, plus on trouve la conception des crucifix entendue largement et rendue avec une simplicité pleine de noblesse. Au IXe siècle, les bras sont étendus presque horizontalement, mais sans raideur affectée, et la pose du corps, tout en annonçant la souffrance d'une gêne cruelle, ne dégénère pas en affaissement ou en torsion d'un effet vulgaire. C'est vers le XIVe siècle que la manière s'introduit dans un spectacle si auguste, le corps de Jésus-Christ se courbe ou plutôt se tord disgracieusement, et les épaules descendent si fort au-dessous des mains, que tout retrace une sorte d'abattement mou, mêlé de je ne sais quelle mignardise gauche. (Ibid., p. 231-232) ».
3° « Au XIII siècle, certains artistes, non contents de la superposition des jambes qu'entraînait la nouvelle coutume de percer les pieds d'un seul clou, imaginèrent de peindre les talons si disgracieusement écartés, qu'il en résulta un croisement des pieds aussi bien que des jambes (Ibid.) ».
4° « La tête de Notre Seigneur est à peu près toujours inclinée sur l'épaule droite on peut dire que c'était une loi. (Ibid.) Il.
5°« Le moyen âge n'a guère connu cette ceinture avare que tant d'artistes modernes mesurent si étroitement au corps du Fils de Dieu. Loin de là, plus on s'élève vers les hautes époques, plus on y rencontre également les crucifix ceints d'une draperie ample et large ».
Soit que le gaufrier dont on s'est servi pour confectionner notre Hostie n'ait point été assez profondément creusé en cet endroit, soit que la pâte n'ait pas bien pris dans le gaufrier, soit que les traits de la configuration primitive aient en partie disparu, il ne m'a pas été possible, avant même que notre Hostie ait été placée dans un corporal et que le contact de l'air eut causé une altération malheureusement très notable, de distinguer entièrement la ceinture du Sauveur, mais :
1° « Le crucifix empreint sur notre Hostie suppose évidemment une haute taille à Jésus-Christ ».
2° « Les bras ne sont ni élevés, ni resserrés comme ceux des Christs du XVIIIe siècle ; ils sont étendus horizontalement, de manière à ce que le corps forme un T au parfait. Le corps n'est ni affaissé, ni raide, on n'y remarque pas non plus ce maniéré qui est introduit au XIV ème siècle».
3° « Les jambes sont superposées, mais il nous a été impossible de discerner si les pieds étaient croisés aussi bien que les jambes ».
4° « La tête de Jésus-Christ est légèrement inclinée sur l'épaule droite».
Ainsi, des caractères encore saisissables dans notre Hostie, il n'en est aucun qui accuse un siècle postérieur au XIIIe, et rien ne s'oppose à ce que le fer avec lequel elle a été moulée appartienne à cette époque reculée.
L'inspection de notre Hostie confirme donc les raisons qui nous déterminent à conclure en faveur de son identité ; car, ayant été moulée avec un fer d'une si haute antiquité, la supposition d'une substitution faite de 1793 à 1805 devient encore plus invraisemblable.
Votre Grandeur, Monseigneur, jugera dans sa sagesse quelle est la valeur de nos raisons, et nous attendrons sa décision, non seulement avec cette soumission entière que nous devons à tous ceux qui ont reçu du Saint-Esprit la charge de conduire l'Église de Dieu, mais encore avec cet amour, cette confiance toute filiale à laquelle a des droits plus particuliers, Monseigneur (permettez-moi de le dire), un Prélat dont les vues sont toujours si droites et si pures, et dont les ouailles ne peuvent admirer assez le courage et la générosité si apostoliques avec lesquels il se dépense tout entier au bien des âmes confiées à sa paternelle sollicitude.
De Votre Grandeur,
Le Très humble et obéissant serviteur, A. Possoz.
Monseigneur l'Archevêque de Cambrai répondait le 13 janvier 1855 au R. P. Possoz, qu'il avait reçu ce rapport, et l'avait lu avec beaucoup d'intérêt, - que la question d'iconographie lui paraissait éclaircie d'une manière suffisante. II ajoutait que les circonstances ne lui paraissaient pas opportunes pour donner une décision définitive. En effet il ordonna plus tard de conserver précieusement dans l'Église Saint-Pierre l'Hostie en question, et d'attendre des temps meilleurs.
Confirmatur Providentiel
de la Reconnaissance
de l'Identité canonique de la Sainte Hostie de Saint-Pierre
avec l'Hostie miraculeuse de Saint-Amé.
Comme nous l'avons signalé immédiatement avant les pièces justificatives, ci-dessus le fond du débat relativement à cette identité ne fait désormais plus l'objet d'aucun doute en fait de certitude ecclésiastique puisque la reconnaissance officielle de la Sainte Hostie faite en 1913 par l'ordinaire des lieux Mgr Chollet, accompagné de M. le Vicaire général Wattel, supérieur du Grand Séminaire de Cambrai, ajoute à tout cet intéressant et important débat la note canonique requise avant le procès définitif.
Aussi avions-nous clôturé en notre pensée et dans la rédaction, la fin de ce chapitre dans ce sens et avec la conviction totale d'avoir suffisamment démontré toute la garantie certaine de cette conclusion. Quand brusquement au moment de mettre l'ouvrage sous presse, il a plu à la Divine Providence d'intervenir Elle-même pour donner sur le nœud précis de tout le débat un confirmatur désormais décisif et irréfragable qui non seulement donne à la reconnaissance canonique de l'ordinaire des lieux la signature du Ciel, mais présente à tout esprit la garantie certaine de l'identité absolue de l'Hostie de Saint-Pierre avec celle de Saint-Amé de jadis.
On sait en effet toute l'importance que le R. P. Possoz, S. J., champion de cette identité attachait au Billet du 29e et dernier prévôt de Saint-Amé, le chanoine P.-F.-X. de Ranst de Berckem qui a rédigé et signé de sa main ce papier qui accompagnait la susdite hostie dans la boîte remise par Alexandre Mornave à Saint-Pierre en 1805. On sait d'autre part combien il considérait à juste titre cet autographe du chanoine de Ranst de Berckem comme la pièce maîtresse de l'argumentation en faveur de l'identité précitée. Cf. l'expertise qu'il fit exécuter à Nantes à ce sujet par le professeur Decorose. Or voici qu'en recherchant un écrit et un portrait de Colvenère dans les Archives de la Collégiale Saint-Pierre qui a eu le bonheur de conserver une partie du fonds de son chapitre de jadis (qui fut supprimé sans doute comme celui de Saint-Amé en 1791 mais dont la Collégiale à la différence de Saint-Amé est demeurée debout) - nous avons eu le bonheur de tomber sur un autographe authentique du chanoine P.-F.-X. de Ranst de Berckem - à l'époque écolâtre du Chapitre de Saint-Pierre et chargé au Parlement de Flandre, comme official de l'Évêque d'Arras, Mgr Marc Hilaire de Conzié des sentences et actes canoniques de ce siège.
Aussitôt nous avons comparé l'écriture de cet autographe du 23 janvier 1776 de l'Ecolâtre du Chapitre de Saint-Pierre avec celle de son billet du 5 janvier 1793 trouvé dans la boîte renfermant la Sainte Hostie que le chanoine précité écrivit alors comme prévôt de Saint - Amé. Sans doute l'écriture de ce billet tracé par M. de Ranst de Berckem 17 ans auparavant alors qu'il était âgé seulement de 39 ans est plus ferme, tandis que celle du billet écrit en 1793 alors qu'il avait 59 ans et dans de telles circonstances tremble un peu. Néanmoins l'écriture apparaît non seulement analogue mais génériquement et spécifiquement la même.
Qu'on analyse en effet sa manière de tracer les s et quelques autres caractères et, à part quelques légères différences dues aux circonstances ambiantes, on doit conclure en toute impartialité que la même main a tracé les deux billets.
D'ailleurs devant l'importance d'un tel débat nous déférons à l'expertise de M. Piétresson de Saint-Aubin, archiviste paléographe et Conservateur des Archives départementales du Nord à Lille, la conclusion impartiale du litige.
Déjà l'un de ses prédécesseurs, M. le Docteur Le Glay, a porté à ce sujet un témoignage important. Mais le verdict autorisé de M. Piétresson de Saint-Aubin, non seulement tranchera à tout jamais le différend mais enlèvera encore à tout esprit droit et sensé l'ombre même du doute le plus léger.
Et c'est ici qu'on se rend compte de tout le bien-fondé de la conviction qui anima jadis le R. P. Possoz qui possédait aussi un original de l'écriture du chanoine de Ranst de Berckem et qui fit refaire à Nantes par le professeur Decorose une expertise dont nous avons antérieurement donné le résultat. Cf. p. 375.
Désormais et définitivement l'affaire sera donc humainement classée et réglée par le verdict de M. Piétresson de Saint-Aubin.
Qu'on veuille bien comparer les 2 documents ci-après, autographes du chanoine P. F. X. de Ranst de Berckem :
le 1er écrit et signé par le susdit comme écolâtre du chapitre de Saint-Pierre le 23 janvier 1776,
le 2eme écrit et signé par le susdit comme prévôt du Chapitre de Saint-Amé le 5 janvier 1793.
Et ensuite prendre connaissance du verdict précité que nous intégrons ci-dessous.
Archives départementales du Nord Lille, le 25 Octobre 1941 , Rue du Pont-Neuf, Lille
Le billet attestant l'authenticité de l'Hostie miraculeuse - billet dont M. l'Abbé Catrin m'a confié l'original - rappelle fortement, par son écriture, le certificat de 1776 donné comme pièce de comparaison. Des ressemblances certaines se retrouvent dans les deux pièces : forme particulière des s qui descendent sous la ligne, barres des t, tracé des c ; les l, généralement non bouclées, les h et les d sont tracés de la même façon.
S'il n'y a pas identité parfaite entre les deux écritures, il faut tenir compte du fait que le billet a été écrit dix-sept ans après le certificat de 1776.
Pendant cette période l'écriture du chanoine de Ranst de Berckem a pu se modifier ; et il n'y a pas là une objection sérieuse contre l'authenticité du document.
P. DE SAINT-AUBIN.